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La coutume : encore source de droit et d’obligations en France du XXI siècle !

Le 17 février 2023

On sait qu’aucun acte d’état civil étranger – par exemple, acte de naissance, de mariage, acte de filiation ou autre – ne pourrait être reconnu en France s’il n’est pas légalisé, ce qui se fait soit par voie diplomatique, soit par voie d’apostille. En effet, selon le paragraphe II de l'article 16 de la loi du 23 mars 2019 la légalisation est la formalité par laquelle est attestée la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l'acte a agi et, le cas échéant, l'identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu.

Or, par une décision en date du 18 février 2022 (n° 2021-972) le Conseil Constitutionnel a déclaré les dispositions législatives visant l'obligation de légalisation des actes publics étrangers destinés à être produits en France contraires à la Constitution. Le Conseil Constitutionnel a, en effet, constaté que les dispositions de l’article 16, II de la Loi 2019-222 du 23-3-2019 ne prévoyaient pas de voies de recours en cas de refus de légalisation, alors que les intéressés n’avaient aucun moyen de soumettre leur éventuelle contestation ni devant une juridiction administrative, ni juridiction judiciaire. Le décret d'application de la loi visée par la décision (Décret 2020-1370 du 10-11-2020) a été annulé par voie de conséquence.

Par principe, une disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut plus être appliquée dès la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel.  

Cependant, dans la situation avec la légalisation le Conseil Constitutionnel a jugé que l'abrogation immédiate des dispositions déclarées inconstitutionnelles entraînerait des conséquences manifestement excessives et a rapporté leur abrogation et annulation au 31 décembre 2022, laissant au législateur et au Gouvernement le temps d’adopter de nouvelles dispositions.

Aucun texte n’ayant été pris avant la fin de l’année 2022, la question est aujourd’hui de savoir si, jusqu’à l’adoption d’une nouvelle loi sur la légalisation, les étrangers peuvent présenter devant l’administration française leurs actes d’état civil sans qu’ils soient légalisés ? Ou bien, les juridictions françaises vont-elles reprendre leur argument fondant l'obligation de légalisation sur la « coutume internationale », comme ça a été le cas pendant 13 ans après l'abrogation par erreur en 2006 d’une ancienne ordonnance royale de la marine d'août 1681 qui était le seul texte prévoyant alors cette obligation (Cass. 1e civ. 15-5-2013 n° 12-16.243) ?

En pratique certains étrangers confrontés à des situations extrêmes pourraient tenter de rechercher à cette question une réponse immédiate en faisant valoir en France leurs actes d’état civil non légalisés. Ce serait à coup sûr le cas des ressortissants ukrainiens des régions impliquées dans le conflit en cours, ou d’autres étrangers qui n’ont aucune possibilité d’obtenir une apostille ou légalisation par voies diplomatiques. Peut-être la coutume qui, selon la Cour de cassation est « par nature évolutive, car tributaire de pratiques consulaires entre États qui peuvent elles-mêmes changer» (Rapport annuel 2009 de la Cour de cassation p. 20) saurait en effet s’adapter à leurs cas ?

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